

Ali Soilih et la révolution du 03 août 1975
Le Guide de la Révolution a, certes, incarné un pouvoir fort ; mais les circonstances dramatiques dans lesquelles se trouvait le pays exigeaient une direction ferme et avisée, exercée avec compétence et orientée vers des objectifs réalistes et réfléchis. C’est ainsi que le Gouvernement Provisoire de 1975, déjà a nimé par le Délégué à la Défense, obtient totale satisfaction, devant l’O.U.A. et devant l’O.N.U., sur la question de Mayotte. Lorsque les relations franco-comoriennes deviennent logiquement impossibles, Ali en tire toutes les conséquences et renonce à une forme d’administration qui ne correspond plus ni aux intérêts du peuple ni à l’objectif d’indépendance.
Il est vrai qu’Ali Swalih, lorsqu’il prend la direction du pays, le 2 janvier 1976, impose à la nation naissante une analyse inédite et une synthèse, fondées sur l’égalité en droit des citoyens. Mais les autres personnalités politiques, surprises par la situation imprévue et attachées au vieil ordre féodalo-bourgeois qu’elles servent et dont elles se servent, ont-elles quelque chose à proposer ?
A cet égard, Ali est plus un dicteur qu’un dictateur. Il est le seul à avoir un projet cohérent et un programme articulé. Il doit, cependant, réformer la structure mentale des cadres qui vont le servir et de la jeunesse sur laquelle il s’appuie. C’est justement ce à quoi il emploie ses séminaires de formation à la Théorie Fondamentale.
S’il est amené à durcir son régime et son action, c’est parce que le peuple comorien n’a jamais été éduqué que dans la peur et par la peur. L’enseignement coranique et l’ordre hiérarchiste féodal (milanantsi/oukabaïla) sont imposés aux individus qui ne peuvent s’y opposer, sans danger et excommunication… Dans ce cadre là, les jeunes, les femmes, les simples travailleurs, n’ont pas droit à la parole.
Pour construire Komoro, Ali a donc prévu une période où il faudra faire peur aux oppresseurs d’hier, aux opposants et à la classe dirigeante des propriétaires fonciers qui ne vont pas tarder à relever la tête et à organiser des complots soutenus de l’extérieur.
Mais cet exercice de la violence ne doit être qu’une étape, correspondant au chaos dans lequel se trouve le pays. A partir de septembre 1978, le pouvoir doit être transféré aux instances moudiriyales et aux Comités Populaires de Moudiriya. C’est alors que les travailleurs s’empareront des leviers politiques et conduiront leur propre développement, en commençant par les tâches de production dont les fruits vont leur revenir.
Sera dépassée la phase confuse où chaque Comité de village dictait sa loi, sans référence à des valeurs mal identifiées, sans grand souci de logique, sans effort pour convaincre plutôt que contraindre…
Mais surtout, Ali sait bien que faire apparaître un Mkomoro nouveau exige un long travail éducatif. L’individu citoyen n’émergera qu’à l’issue d’une formation humaniste, assurée par une école rénovée. Cela implique de mettre en place une structure éducative inédite qui embrasse l’enfance et l’adolescence des individus.
C’est pourquoi la contradiction relevée n’est qu’apparente et qu’au contraire, il y a cohérence entre le temps exceptionnel de la fondation et le temps long de la formation de l’individu citoyen…
Sources : Djahazi
